L'AUTRE ZOO, LA NUIT

La saga d'un été

2006-07-31

CHAPITRE 3

Dans la nuit blafarde

Mon amie, lorsqu’on se sent impuissant devant la fatalité, ou soit qu’on se mette à crier ou à se plaindre, ou soit qu’on se taise. Ma sœur et moi n’avions pas le choix. Toute discussion un tant soit peu animée avec le médecin ou l’infirmière n’aurait pas servi à grand chose, sinon qu’à bouleverser maman davantage. Alors, on l’a installée tant bien que mal dans un fauteuil roulant, puis, je me suis empressée aussitôt d’aller chercher ma voiture dans le stationnement situé juste à proximité de l’urgence.

Il était plus de 4 h du matin. Déjà de faibles lueurs annonçaient vaguement le lever du jour prochain. En plus de la brume qu’il faisait à cette heure, l’humidité était omniprésente. Sous une lumière blafarde, ma sœur attendait avec maman enveloppée dans un drap d’hôpital, près de la porte de sortie de l’urgence.

Dans le stationnement, j’ai aussitôt démarré ma voiture, actionné les essuie-glaces, puis tourné le thermostat afin de faire sécher toute l’eau qui ruisselait sur mes vitres et mon pare-brise. Lorsque je suis arrivée près de la barrière, ah! merde de c …! je n’avais pas de jeton pour la faire lever! Après tous ces émois, j’avais oublié de payer en sortant de l’hôpital. Sentant la patience me lâcher, j’ai laissé ma voiture entre les balises de ciment de la sortie et je suis rapidement retournée sur mes pas. Au passage, j’ai prié ma sœur et maman de ne pas s’inquiéter et que je viendrais les chercher dans une minute.

Puis, après être remontée dans ma voiture serrant le précieux jeton entre mes doigts, je me suis mise à chercher pendant quelques secondes l’endroit précis où le déposer. Comme la boîte était noire, on ne voyait bien, en fait, qu’un petit rectangle lumineux où c’était écrit : « TOKEN ». J’ai alors appuyé le jeton en position verticale directement dessus. Je croyais que placé ainsi, il finirait par tomber à l’intérieur en le poussant avec mon pouce.

Erreur! Le jeton s’étant coincé-là refusait absolument de bouger, comme si un aimant l’avait aspiré pour l’empêcher de sortir. Rien à faire. Ni avec mes doigts ni avec ma clé de voiture. J’étais en nage. Puis, tout à coup, ne voilà-t-il pas que j’aperçois juste à côté à gauche, la fente dans laquelle, j’aurais dû l’avoir glissé depuis le début! L’obscurité sans doute m’avait empêchée de la voir. Justement, comme par hasard, les lueurs du jour commençaient à se faire de plus en plus insistantes.

Enfin, réalisant dans quel pétrin, je m’étais placée, je me morfondais en regardant ma sœur et maman qui devaient se languir d’impatience là-bas, devant la porte de l’urgence sous la lumière blafarde. Puis, mes yeux se sont finalement posé sur un petit bouton noir situé juste en dessous d’un microphone. Je l’ai donc poussé machinalement. Aussitôt, la machine s’est à cracher une voix nasillarde aux accents métalliques : « Vous avez des problèmes ? »

Je ne me souviens pas, mon amie, en quels termes j’ai expliqué au préposé la nature du problème que j’avais, mais, je me rappelle très bien lui avoir dit d’ouvrir cette barrière au plus vite, sinon je l’enfoncerais avec ma voiture. « Ne faites pas ça, madame, vous allez être enregistrée par la sécurité de l’hôpital. » Faut-il te dire, mon amie, que je n’avais pas envie d’entendre ce genre de propos à ce moment-là? « Je m’en fiche éperdument de votre sécurité. Puis de la police. Puis de l’armée aussi, mon cher monsieur…! », lui ai-je répondu avant d’engager brusquement ma voiture en marche arrière.

Dans mon désarroi, j’ai à peine entendu qu’il enverrait quelqu’un sur place. J’avais la tête en feu. Or, j’ai eu la folle idée de faire le tour du stationnement à toute vitesse pour y chercher à tout prix, une issue. Un bout de chaîne un plus basse ou complètement affaissée, un petit espace de rien du tout et de n’importe quoi, bref, enfin, que sais-je, un endroit par où j’espérais pouvoir me sortir de là, évidemment, sans trop endommager ma voiture. Et tout cela, bien sûr, avant que je ne saute une coche, mon amie!

Hélas! prise au piège comme une lionne en cage, je suis donc revenue complètement découragée vers la barrière. Enfin, à l’aide d’un tournevis, le préposé était là, devant moi, en train d’essayer de sortir mon jeton. Coincé, lui aussi, dans l’affreux piège de cette nuit infernale. « S’il y avait eu un peu d’éclairage ici, je l’aurais vu votre fente! », lui ai dis-je, en sortant de là, dans un état que je n’ose même pas te décrire. Il était cinq heures moins vingt ...
È toi pour toujours,
May West

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